La première résidence pour personnes sourdes sort de terre rue Jean-Massieu
RONCHIN |
Hier matin, un cortège d'élus et de représentants du bailleur social LMH ont visité le chantier de la résidence pour déficients auditifs, en construction sur un terrain jouxtant la rue Louis-Braille. Au printemps 2012, les premiers locataires pourront s'installer dans ce qui s'annonce pour le moment comme une construction inédite en France.
Pour comprendre l'origine du projet, il faut remonter quelques années en arrière. Au cours d'un banquet de l'IRPA, l'Institut de réhabilitation de la parole et de l'audition implanté depuis des décennies à Ronchin, le maire, Alain Rabary, discute avec René Dekemel. La premier a été enseignant et a dirigé la structure pendant 35 ans, le second, Ronchinois pure souche, l'a fréquentée pendant de longues années.
Philantrope
Issu d'une lignée d'agriculteurs propriétaires terriens dans la commune, René dispose encore de vastes parcelles désormais inutilisées. Plusieurs promoteurs immobiliers lui ont déjà dressé des ponts d'or pour se les octroyer. Mais René a une autre idée en tête. Il veut faire quelques chose pour les sourds. Et c'est au cours de ce repas que la solution va apparaître, limpide, « alors qu'on n'avait pas encore bu », sourit Alain Rabary. Dans la foulée, René a cédé gratuitement une parcelle de 4 000 m² à la municipalité qui s'est chargée d'y faire sortir de terre un ensemble de logements spécifiques réservés aux personnes déficientes auditives.
Hier matin, les deux hommes savouraient à sa juste valeur l'avancée des travaux. Car si les tractations, en coulisses, ont duré plusieurs mois, le projet est désormais bien concret, piloté par le bailleur social LMH qui fait ainsi une entrée remarquée dans la commune.
La visite de chantier a amené la cinquantaine de personnes présentes à découvrir l'intérieur de ces 22 logements (quatre collectifs et dix-huit individuels). Référencés « Très haute performance énergétique », ils font la part belle au bois, mais pas uniquement pour des raisons environnementales. Tout, ici, est étudié pour favoriser la vue et le toucher. Les sols en bois produisent des sons sourds sous les pas et des vibrations auxquelles sont sensibles les personnes malentendantes. Des flashs (qui indiquent qu'on sonne à la porte par exemple) seront installés dans chaque pièce.
Les cuisines, de type américain, seront ouvertes sur le salon et des mezzanines permettront également de voir une partie des étages, le tout pour faciliter une communication visuelle et gestuelle.
À Amsterdam, déjà
Au pied des maisons, MM. Depont, président de l'association Santé, Potier, président de l'amicale des anciens élèves sourds de Ronchin, et Ramez, de la fédération nationale des sourds de France, ne cachaient pas leur satisfaction. « Nous avions beaucoup discuté avec d'autres sourds de ce quartier spécifique, indiquent-ils. Nous avions vu un projet de ce genre à côté d'Amsterdam, aux Pays-Bas, nous voulions développer la même idée. Beaucoup de personnes sourdes ont un logement, mais elles s'y sentent souvent isolées. Ici, dans ce quartier, elles ne s'ennuieront pas, elles pourront communiquer ensemble. C'est une très grande fierté. » Plusieurs demandes de logements ont déjà été adressées à LMH. Les premiers occupants devraient pouvoir s'installer en avril 2012 dans cette nouvelle rue qui porte déjà le nom de Jean-Massieu, ancien directeur de l'école des sourds de Lille. Alain Rabary et René Dekemel, qui se sont inscrits dans ses pas, y tenaient. C'est fait. •
Hier, dans le cadre de la journée mondiale des sourds (décidée en 1958, lors d’une assemblée internationale), l’Association générale des sourds de Montpellier et sa région (AGSMR) a organisé un rassemblement, du Peyrou au centre-ville. Avec pour but de rendre plus évident encore le "regard que portent les entendants sur les sourds". Et de prôner "une égalité des chances en pleine citoyenneté".
Une petite centaine de personnes venues de toute la région avait fait le déplacement, afin de faire passer un message positif, notamment dans le domaine culturel.
Il fut d’ailleurs question, hier, de véritable "beauté des gestes" concernant "la richesse de la langue des signes".
Une journée, donc, largement ouverte à tous, y compris au monde de l’entreprise représenté par bon nombre de ses acteurs.
Parmi les signes encourageants de reconnaissance, l’ouverture, faite hier comme souvent, aux personnes atteintes de surdité par le musée Fabre.
Sur un plan plus politique, il fut également question d’inquiétudes concernant les financements associatifs.
Les personnes sourdes et malentendantes en ont assez d’être incomprises, stigmatisées, marginalisées. À la faveur de la Journée mondiale des sourds, elles ont décidé d’être visibles pour mieux se faire entendre et revendiquer leur juste place dans la société.
Hier à Nancy, un collectif regroupant les associations de sourds de Lorraine, organisait une marche symbolique, pour tout le Grand Est, suivie de discours en langue des signes, prononcés sur la place Stanislas.
Tee-shirt noir et gants blancs pour la beauté des gestes, Christophe Laroche est le président de l’association vandopérienne CRI et Rex. Il est aussi le premier enseignant universitaire en langue des signes, et travaille à la faculté des lettres de Nancy. « Cette marche n’est pas une manif, c’est une marche silencieuse pour dire qu’on existe et qu’on est visible. Ce qui s’est passé dernièrement à Marseille, où un commandant de bord a refusé d’embarquer vingt-deux sourds en raison de leur surdité, en invoquant la sécurité, illustre bien cette incompréhension. »
Les personnes sourdes sont atteintes d’un handicap invisible, mais la plupart arrivent bien à communiquer, par écrit, par lecture labiale. L’idéal serait que ceux qui sont en face « comprennent qu’ils peuvent aussi communiquer avec leur corps, par visuo-gestuelle, en opposition à la communication audio-phonatoire », ajoute Olivier Marchal.
Le président de l’association Sourd métrage est professeur au Lycée Varoquaux de Tomblaine où il enseigne la langue des signes à des jeunes sourds, malentendants ou à des lycéens désireux de communiquer avec leurs parents atteints de surdité.
M. R.
publié le 25/09/2011 à 05:00
http://www.republicain-lorrain.fr
Emploi, démarches : le parcours est semé d'embûches pour les sourds
LES VISAGES DE L'ACTUALITÉ |
Difficultés à se faire comprendre au guichetd'une administration ou chezun médecin, obstacles pour décrocher un emploi... Depuis jeudi et jusqu'à ce soir, la parole est aux sourds et aux malentendants à la Maison de l'éducation permanente, dansle cadre des 13es Journées mondiales des sourds.
S'il arrive à se faire comprendre des commerçants « grâce aux mimes », le quotidien de Jérôme, Lillois de 37 ans et sourd de naissance, est loin d'être un long fleuve tranquille. Surtout lorsqu'il doit effectuer des démarches administratives ou acheter un billet de train. « Il n'y a pas assez de personnes formées à la langue des signes (LSF), soupire Jérôme. Mais pour moi, le plus dur, c'est le téléphone. Impossible de répondre à un appel. »
Perte d'auditionet d'emploi
Une situation gênante au quotidien, et qui a même coûté son emploi à Léocadie, 23 ans. « Je travaillais dans une banque qui m'a licenciée car je n'étais pas capable de répondre aux appels téléphoniques. Depuis, je n'ai pas retrouvé d'emploi », précise la jeune femme, qui a perdu progressivement l'ouïe à l'âge de 3 ans. Une perte brutale psychologiquement car « j'ai eu le temps de m'habituer à ce qu'est le bruit, même si on parlait déjà en langue des signes à la maison, mes proches étant sourds. J'appartenais au monde des entendants et des sourds, avant de n'appartenir qu'au second ». Si elle communique sans difficulté avec les membres de sa famille, elle ne peut s'empêcher de trouver pesante cette barrière du langage qui limite la communication entre sourds et entendants. « Lorsque vous avez un problème de remboursement avec la CAF, c'est très difficile de se faire comprendre. La langue des signes n'est pas assez enseignée aux agents. Et pour prendre un interprète, ce n'est pas évident. Il n'y en a que quinze pour toute la région ! » Soit un interprète pour 1 000 personnes, et un seul médecin au CHR capable de communiquer en langue des signes pour la région. « Il y a encore bien des efforts à faire dans la région en matière d'accessibilité à la médecine, analyse Jean-Pierre Dupont, le président du Centre de formation à la langue des signes (CFLS). Une loi de 2005 rend obligatoire l'accessibilité des services publics pour 2015. On n'y est pas encore, comme pour l'accès à l'emploi. Les sourds peuvent travailler dans tout type de métier, et pas simplement les manuels. J'aimerais qu'on ait plus de sourds qui deviennent chauffeurs de taxi ou avocats. Il n'y a aucune raison que les sourds soient des citoyens de seconde zone. » Les participants à ces 13es Journées internationales des sourds feront d'ailleurs entendre leur malaise cet après-midi dans les rues de Lille, lors d'une parade en gants blancs. •
Information et renseignementpour des cours de LSF sur le site www.languesignes-lille.fr
Sourds et malentendants refusés à l'embarquement : discrimination ou protection ?
Vingt-deux passagers n'ont pas pu embarquer sur un vol à destination de la Tunisie en raison de leur handicap physique. Que dit la loi ?
Ce n'est pas une première, mais l'annonce a fait grand bruit. Vingt-deux retraités marseillais sourds-muets et malentendants ont été refusés à l'embarquement dans l'avion qui devait les conduire en Tunisie. Les "raisons de sécurité" invoquées par Air Méditerranée reposent sur les risques encourus par ces personnes "à mobilité réduite", pas ou peu aptes à comprendre les consignes de sécurité. Faute d'avoir été prévenu à l'avance, le transporteur n'a pas eu le temps de prévoir un renfort de personnel. "C'est un défaut d'information qui nous a mis dans l'impasse, regrette Anne Loubet, directrice générale de la compagnie aérienne. Nous leur avons proposé de les acheminer le jour même sur leur destination, mais ils ont refusé."
Réglementation européenne
Pourtant, la décision de la compagnie n'est pas le fruit d'un coup de tête. "Une réglementation européenne cadre sur le transport des passagers à mobilité réduite impose à toute compagnie aérienne de prendre des mesures de sécurité adaptées et spécifiques pour garantir la sécurité des personnes présentant une incapacité physique (sensitive ou motrice)", explique Christophe Ayela, avocat d'Air Med.
Le règlement EU-OPS intitulé "transport de passagers à mobilité réduite" prévoit notamment que "l'exploitant doit s'assurer que les passagers à mobilité réduite ne se voient pas attribuer des sièges ou n'occupent pas de sièges où leur présence pourrait gêner les membres de l'équipage dans leurs tâches, entraver l'accès à un équipement de secours ou gêner l'évacuation d'urgence de l'avion. Leur présence à bord doit être signalée au commandant de bord". "Si tout le monde n'est pas en mesure de comprendre les règles de sécurité, l'avion ne peut pas décoller", précise Me Ayela.
Enquête en cours
En complément de ce règlement, chaque compagnie est libre d'écrire dans son manuel d'exploitation des consignes complémentaires. En l'occurrence, la réglementation interne du transporteur Hermès (qui a affrété l'avion d'Air Med) prévoit un accompagnant par passager et un personnel navigant supplémentaire à partir de cinq personnes. "On a fait le choix de respecter la loi et de proposer aux passagers d'embarquer sur un vol ultérieur respectant ces consignes, mais cette proposition a été refusée", déplore-t-on chez Air Med.
Les mesures adoptées par la compagnie sont-elles alors trop contraignantes ? Une enquête a été ouverte à la demande du secrétaire d'État aux Transports Thierry Mariani. Celui-ci a saisi la DGAC afin d'examiner "si, dans cette affaire, les normes en vigueur ont bien été respectées, et notamment si les passagers atteints de surdité doivent recevoir un traitement adapté au titre des règlements relatifs à la sécurité du transport aérien", selon un communiqué du ministère. La DGAC (Direction générale de l'aviation civile) examinera en particulier les deux questions suivantes : est-il justifié de traiter les passagers atteints de surdité de manière spécifique au titre des règlements relatifs au transport aérien des personnes à mobilité réduite ? Et, si oui, à quel moment les opérateurs ont-ils été informés de la situation du groupe de personnes concernées et les conséquences en ont-elles bien été tirées ?
Cédric Lorant, président de l'Unisda (Union nationale pour l'insertion sociale du déficient auditif), estime pour sa part que les personnes malentendantes sont capables d'assimiler des consignes de sécurité et de voyager de manière autonome. Le groupe de retraités a, lui, annoncé son intention de porter l'affaire devant l'ex-Halde (Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité), désormais fondue dans les attributions du Défenseur des droits, Dominique Baudis.
"On s'oriente vers un faux débat alors que nous ne faisons que protéger ces personnes, s'indigne Anne Loubet. On m'accuse de ne pas avoir transgressé la loi. Or, s'il y avait eu le moindre accident, comment aurait-on pu évacuer ces 22 personnes en l'absence du personnel adéquat ?"
18 personnes n'ont pu prendre leur avion dimanche à Marseille pour "des raisons de sécurité".
Ils se sont vus refuser l'embarquement en raison de leur handicap. Un groupe de 22 voyageurs, dont 18 personnes sourdes et muettes, n'a pas pu prendre dimanche à Marseille le vol d'Air Méditerranée pour la Turquie pour "des raisons de sécurité" .
Le vol étant prévu dans la nuit de dimanche à lundi à 5 heures du matin, "tout le groupe a pu enregistrer sans problème et leurs valises sont parties en soute", a expliqué Fabienne Guiramand, interprète en langue des signes, dont la mère faisait partie du groupe.
Un problème de sécurité évoqué
"Le pilote a décidé qu'il n'avait pas à prendre ce groupe de personnes sourdes, considérant d'une part qu'il n'avait pas été prévenu et d'autre part qu'il y avait un problème de sécurité", a raconté à Europe 1, Fabienne Guiramand.
"Ce n'est pas le cas des personnes sourdes. Elles sont tout à fait capables d'intégrer les consignes de sécurité qui sont dispensées par les hôtesses dans un avion. Elles maitrisent le français écrit. Elles ont juste une autre langue qui est la langue des signes. Elles sont tout à fait autonomes et capables d'intégrer les consignes de sécurité. Si le pilote est effectivement le seul maître à bord pour évaluer les risques, il aurait dû se déplacer et au moins rencontrer les personnes. Je trouve que c'est un manque de respect profond. Ce qu'il n'a pas fait du tout", regrette-t-elle.
"C'est un manque de respect profond" :
Des "personnes à mobilité réduite"
"Les malentendants sont considérés comme des personnes à mobilité réduite, et nous devons mettre en place des personnels supplémentaires dans ces cas-là", a expliqué Anne Loubet, directrice générale de la compagnie, à Libération qui révélait l'affaire mardi soir.
La compagnie se défend en précisant qu'il y avait aussi dans le groupe des personnes sourdes et aveugles. Une information totalement fausse. Dans ce cas, il aurait fallu effectivement un encadrement spécifique.
La famille de Marcelle déplore cette mauvaise foi et demande, comme les autres, le remboursement du voyage. Pour elles, il y a eu discrimination. Le groupe compte également porter l'affaire devant l'ex-Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité) désormais fondue dans le nouveau poste de Défenseur des droits.
Incompréhensible pour Bachelot
La ministre des Solidarités, Roselyne Bachelot, a pour sa part, demandé mercredi au Défenseur des droits "un point sur les discriminations que subissent encore les personnes handicapées dans l'accès aux transports". "Dans un vol aérien, une personne sourde est dans la même situation qu'une personne qui ne comprend pas la langue de l'équipage. Devrons-nous désormais réserver l'accès à bord aux seules personnes qui parlent l'anglais ou le français ?", s'est interrogée la ministre, qui a dit "ne pas comprendre qu'en 2011 de telles discriminations se produisent encore". Le Défenseur des droits, Dominique Baudis, a annoncé mercredi soir se saisir du dossier.
Par Europe1.fr et Nathalie Chevance, correspondante d'Europe 1 à Marseille, et AFP
http://www.europe1.fr
Les nouvelles technologies à la rescoussedes personnes malentendantes
RENCONTRES |
« Imaginez vous voyageant en Russie ! Vous avez un accident... Vous ne savez pas quoi faire ...
car vous ne parlez pas le russe ? Eh bien, moi, c'est mon souci tous les jours en France. » Pour s'exprimer, Jean-Pierre Dupont fait de grands gestes. Rien de véhément là-dedans. Ce responsable du Centre de formation à la langue des signes (CFLS) emploie, justement, la seule méthode lui permettant d'éviter l'isolement. Encore faut-il avoir, à ses côtés, une personne apte à traduire ses gestes en paroles.
Une insertion encore difficile
À partir de demain, et jusqu'à samedi, Lille accueille les Journées mondiales des sourds. Ces rencontres seront l'occasion de rappeler que l'insertion des personnes sourdes dans un pays riche et développé comme la France demeure une tâche loin d'être achevée. Les organisateurs de ces Journées profiteront cependant de l'occasion pour rappeler qu'un moteur peut largement contribuer à accélérer cette intégration. En l'espèce, les nouvelles technologies. D'où la présence, à ce rendez-vous lillois, d'opérateurs comme Orange.
Une conférence peut ainsi devenir l'occasion de distribuer des bons et des mauvais points. Jean-Pierre Dupont adresse ainsi un coup de chapeau à la Caisse d'allocations familiales de Lille où différents outils high-tech sont mis à la disposition des personnes malentendantes. Ailleurs, il faut souvent se contenter de boucles magnétiques, des équipements permettant de connecter les micros des agents aux appareils auditifs des usagers. « À Lille, nous développons l'accessibilité de ces personnes grâce à un équipement web sourds », commente Sylviane Delacroix, adjointe au maire déléguée aux personnes handicapées.
Traduction à distance
Grâce à un système de webcam et d'écrans vidéo, une personne à un guichet (état civil, Pass enfant, cantine scolaire...) peut bénéficier d'une traduction à distance en langage des signes.
Les rencontres de cette semaine doivent également présenter tous les avantages, en faveur des personnes malentendantes, pouvant découler de la technologie mobile 3G. Les sourds disposent aussi dorénavant d'un numéro d'appel d'urgence, le 114. • L. B.
Maison de l'éducation permanente, place Georges-Lyon. De jeudi à samedi. Début des rencontres à 9 h.
Mardi 20 septembre - C'est une histoire étonnante, qui s'est déroulée dans la nuit de samedi à dimanche à l'aéroport de Marignane. Un groupe de 23 personnes dont 18 étaient sourdes ou malentendantes devait prendre un avion Air Méditerranée pour la Turquie, pour un séjour de huit jours. Mais au moment d'embarquer, le commandant a refusé. Motif ? Ces gens là n'entendaient pas et cela posait un problème de sécurité. Les "personnes à mobilité réduite", leur a-t-il fait expliquer, doivent prévenir 48h à l'avance, pour que la compagnie prévoie du personnel supplémentaire, à raison d'une pour 5 personnes à mobilité réduite". Mais une personne malentendante est-elle réduite dans sa mobilité ?..
« Les personnes sourdes entendent très bien avec les yeux, et de façon souvent plus attentive que beaucoup d'autres passagers, remarque Fabienne Guiramand, interprète en langue des signes dont les parents voyageaient sur ce vol. Elle ajoute: "Quand des Chinois par exemple voyagent, ils ne comprennent souvent pas mieux les mots dans les cabines. C'est juste un problème de langue, pas de handicap. » La directrice générale de la compagnie, Anne Loubet,renvoie à la règlementation, en réalité assez floue. Le voyage annulé, les 23 personnes se sont réunies ce mardi matin. Elles ont décidé de porter plainte devant la Halde. Papier à lire demain matin dans Libération. Ce soir, LCM consacre un sujet à cette histoire, après avoir ouvert sur FO son journal du soir (espoir).
Rita, Grégory, Malick, handicapés et cuisiniers comme les autres
BEZIERS (Hérault) — Tuile à la tomate, cuisse de caille à la catalane, brochette de hampe de boeuf ou royal de foie gras: sous le regard de deux chefs réputés, Rita, Grégory et Malick, trois handicapés, ont démontré lundi à Béziers qu'ils pouvaient être des cuisiniers comme les autres.
"C'est vraiment génial. Je suis très contente. J'adore ça ! J'adore ça ! Je les voyais à la télé. Je voulais participer avec eux. Et là, j'y suis", s'émerveille Rita, sourde et muette, en langage des signes.
"J'ai appris beaucoup de choses, comme faire sauter le veau. Je suis sûr que cela va me servir", témoigne Grégory, déficient léger mental.
Montée par l'Agefiph (Association de gestion du fonds pour l?insertion professionnelle des personnes handicapées), cette opération de communication avait pour ambition de prouver que le déficient, mental ou physique, victime selon les statistiques d'un taux de chômage deux fois supérieur à celui d'un travailleur valide, n'est pas un frein pour l'entreprise, quelle qu'elle soit.
La loi de 1987 exige l'embauche de 6% de travailleurs handicapés dans les entreprises de plus de 20 salariés. Mais au 31 décembre 2010, 257.121 demandeurs d'emplois étaient identifiés handicapés, selon l'Agefiph.
"Le problème du travailleur handicapé, dans une cuisine ou ailleurs, c'est que les patrons ont peur. C'est ce verrou que nous voulons faire sauter. Il faut changer les regards", dit Benjamin Lureau, délégué régional de l'Agefiph. "Il faut qu'un handicapé soit jugé sur ses compétences, sur les résultats et non sur un a priori", ajoute-t-il.
Langue des signes en cuisine
Derrière une vitre, les trois cuistots s'activent tandis que les invités du goûter les regardent, étonnés. Ils apportent les correctifs exigés par Pierre Augé, finaliste de l'émission télévisée Top Chef en 2010, et Grégory Cuilleron, vainqueur de l'émission "Un dîner presque parfait" en 2009.
"On ne peut peut-être pas tout faire avec un handicapé mais on peut faire beaucoup", assure ce dernier. Devenu ambassadeur de l'Agefiph, il n'avait pas prévu de jouer ce rôle mais dit s'être "vite rendu compte" que sa réussite avait "valeur d'exemple".
"Il faut leur donner leur chance", affirme Rémy Cailliez, patron du restaurant Ecrevisse d'Alsace à Narbonne et employeur de Malick, léger déficient mental en contrat de formation.
"On pense que c'est compliqué. Pas du tout. Ce sont des ouvriers comme les autres. Il faut juste être un peu plus patient avec eux. C'est un plaisir", ajoute ce restaurateur qui a déjà formé deux autres jeunes handicapés.
"Ils sont plus passionnés et plus attentifs", dit Benjamin Braen, délégué de l'entreprise de restauration Sodexo, qui emploie sur le plan national environ 900 handicapés (sur 24.000 employés).
Parmi eux, Rita, dont M. Braen a fait spécialement aménager le poste de travail: "On a mis des lumières qu'elle peut activer en cas d'urgence et on a donné des cours de langue des signes à ses collègues".
Résultat, Rita qui a toujours travaillé dans la restauration, notamment dans la cuisine avec son ex-mari, est aux anges. Et Grégory Cuilleron apprécie en goûtant les plats: "Franchement, plus d'un pourrait lui envier ses capacités!".
« la langue des signes doit être reconnue comme patrimoine linguistique »
À l’occasion des Journées Mondiales des Sourds du 19 au 24 septembre 2011, Europe Ecologie Les Verts (EELV) Toulouse rappelle « la nécessité d’accroître l’accessibilité à la communication et à l’information du public sourd. Les personnes sourdes et leurs proches sont des milliers à pratiquer la Langue des Signes Française (LSF). Cette langue doit être reconnue à part entière, comme partie intégrante du patrimoine linguistique français. Nous considérons que sa pratique et sa diffusion doivent être encouragées ».
« La surdité est pour certains un handicap invisible, facteur d’exclusion sociale, pour d’autres une culture riche portant des valeurs de citoyenneté et de partage. Par manque d’information, ou faute de traductions et de sous-titrages, les personnes sourdes regrettent souvent une mise à l’écart de la vie politique, une exclusion des débats, une inégalité dans l’exercice de leur citoyenneté » a indiqué un communiqué de presse.
« Pour nous, l’inclusion de tous dans notre société passe également par la prise en compte de ces besoins de reconnaissance et d’échanges, donc par la valorisation de cette langue et de cette culture » ont conclu les élus Verts.